Cet ouvrage présente les textes clefs du pragmatisme visant la philosophie sociale et politique. Ce livre tente de montrent la continuité des enjeux abordés par le pragmatisme et sa capacité à penser la confrontation avec les défis contemporains.
Le pragmatisme est une méthode philosophique tournée vers le monde réel. Le terme désigne parfois un mouvement de pensée selon lequel n'est vrai que ce qui a des conséquences réelles dans le monde.
La philosophie pragmatiste, première à se forger dans le continent nord-américain, est peu connue en France surtout sous l’angle d’une philosophie sociale et politique. Elle est étonnement dédaignée par l’établissement académique, et l’arrogance des Importants cultivés selon l’expression d’Alain.
Pourtant au début du siècle ce n’était pas le cas, comme témoignent les échanges du pragmatisme de James, Dewey et d’autres avec les penseurs H. Bergson, et G. Sorel. Si le vrai initiateur du pragmatisme est Charles Sanders Peirce les figures les plus connues sont Dewey et James.
Mais, revenons à l’ouvrage en questions, compilé et dirigé par Roberto Frega, Chargé de recherche du CNRS, il nous livre une intéressante introduction sur les antécédents et le retour du pragmatisme.
La première partie est réservée à certains textes classiques :
° John Dewey : la critique de la civilisation américaine
° John Dewey : La démocratie est radicale
° John Dewey : Un libéralisme qui tourne à vide
° Jane Adams : la nécessite sélective des œuvres de bienfaisance sociale
° George H. Mead : Les droits naturels et la théorie des institutions politiques et Sidney Hook : La démocratie comme mode de vie
Une deuxième partie comprend des textes qui s’inscrivent dans un mouvement de renouveau et de redécouverte
° Richard J Bernstein : la démocratie créatrice, la tâche qui attend toujours.
° John Rider : naturalisme pragmatique et marxisme
° Charlène Haddock Siegfried : Socialiser la démocratie
La troisième et dernière partie ressemble des travaux plus récentes, qui invitent à élargir le champ d’analyse pragmatique à des thématiques nouvelles telles que les suivantes :
° Paul Taylor : pragmatisme et race
° Patricia Hill Collins : assembler le puzzle généalogique : l’inter sectionalisme et le pragmatisme américain
° Elisabeth Anderson : l’épistémologie de la démocratie
° Charles Sabel : Dewey, la démocratie et l’expérimentation.
Faut-il rappeler que dans la perspective pragmatique, réfléchir revient à identifier l'ensemble de ses implications pratiques d’une chose, car seuls ses réquisitoires confèrent un sens à la chose pensée. Les idées deviennent, nécessairement des instruments de la pensée. Quant à la vérité recherché, elle n'existe pas a priori, mais elle se révèle progressivement par l'expérience. Il s'agit en fait d'une philosophie empiriste : la notion de conséquence pratique est fortement liée à la question de savoir quels effets proposés par une théorie sont espérés dans l'expérience concrète ; En réalité, Le « Pragmatisme » vient du grec pragma (le résultat de la praxis, l'action en grec) ce qui témoigne de l’importance du concret, du particulier, de l'action en opposition aux idées abstraites et vagues de l'intellectualisme rationaliste moderne.
Le précurseur du pragmatisme est C.S.Peirce pour qui la pensée doit porter sur des objets réels. Cela l'amène à s'opposer à la fois au réalisme métaphysique des platoniciens et au réductionnisme conceptuels des nominalistes. En effet, chez lui la réalité possède quelque chose d'irréductible, d'indéterminée de sorte que « ce n'est pas le particulier qui est le plus naturel, mais, le vague, le général, ces deux formes de l'indétermination réelle et irréductible.
Peirce ne pense pas l'enquête comme la recherche de la vérité "per se" mais, un entre le doute la croyance qui anticipe un acte. Donc la croyance est une « règle active en nous » et une « habitude intelligente » Ainsi Peirce parlera de « quatre méthodes de fixation de la croyance :
° La méthode de la ténacité : c’est de loin la plus économique : elle préconise de croire ce que chacun croit déjà et d’ignorées les informations contraires.
° La seconde ou « méthode d’autorité » elle, prend en compte la pression sociale. L’État légiférer et pratique l’endoctrinement, évitant ainsi de se poser des questions susceptibles d’engendrer des doutes et des châtiments. Et si l’histoire a démontré sa redoutable efficacité, elle échouera finalement : nulle institution n’a le pouvoir de s’imposer opinion publique ; ainsi les individus devront se faire une idée, par eux-mêmes ; et, certains chercherons une autre méthode capable de leur assurer le contenu de ce qu’ils croient.
° La troisième méthode dites « à priori », celle qui plait à la raison. Dans ce cas la vérité de Évidement cette méthode fait dépendre les croyances du caprice et de l’accidentel
° Enfin, la méthode de la science ; L'enquête suppose qu'il est possible de découvrir la réalité indépendamment d'une opinion particulières et ainsi invalider la croyance, la critiquer, la corriger ou l'améliorer, afin d’établir une croyance stable. La méthode scientifique est la seule capable de fixer la croyance à prendre au sérieusement l’expérience.
Il y a donc une normativité de l’enquête ; et, s’il est rationnel d’adopter l’hypothèse de la réalité et de vouloir faire correspondre les opinions au réel, il s’impose de comprendre comment la méthode scientifique peut seule contribuer au progrès de la connaissance par une description correcte de la réalité.
La méthode scientifique comporte deux aspects, l’observation, et le mode de raisonnement critique. L’originalité de la démarche de Peirce est de les intégrer en associant (et en réinterprétant) trois types d’inférence : la déduction, l’induction, mais aussi l’abduction, que pour Peirce est la « logique du pragmatisme ».
L’abduction présuppose quelque chose de non observable directement. Dans l’abduction on passe de l’observation de certains faits à l’explication par un supra principe général qui les expliquerait tels qu’ils sont et ne sont pas.
Enfin, l’intérêt et la richesse de ce livre est de mettre à la disposition du grand public une somme introductive qui rendra plus simple le retour d’une discussion qui n’a pas eu lieu dans le milieu intellectuel français depuis fort longtemps : L’expérience.