Colonisation : droit d'inventaire, Claude Liauzu (dir.), Paris, Armand Colin, 2004, 352 p.
Cet ouvrage collectif marque une étape importante dans l'historiographie de la colonisation. Selon Claude Liauzu, l'historien doit corriger autant que possible les distorsions que la mémoire et les préjugés idéologiques font subir à notre lecture du passé. On peut dire qu'il fait sien le précepte bien connu de Tacite, et qui pourrait figurer ici en exergue, d'après lequel on doit écrire l'histoire « sans colère comme sans faveur ».
L'objectif de ce livre est d'intégrer les acquis successifs d'une historiographie complexe dont Claude Liauzu rappelle en introduction les lignes de force. Il s'agit ensuite de rassembler les connaissances éparses à travers la remise en valeur de la notion de « situation coloniale ». Les auteurs délimitent leur champ d'étude autour de trois axes : ils considèrent les sociétés impliquées comme des sociétés post-coloniales ; ils articulent leur réflexion autour de la dialectique de l'interdépendance et de la différenciation ; enfin, ils tiennent compte du fait qu'il existe d'autres formes d'unité politique que l'Etat-nation.
L'ouvrage, pourvu de cartes, glossaire et index, est divisé en deux grandes parties. La première analyse les principaux temps forts - sans se contenter d'un simple récit chronologique -, de la conquête de l'Algérie aux décolonisations des années 60. Les onze chapitres de la seconde, dressent un état des lieux de la recherche sinon exhaustif, du moins très complet. Que le pari consistant à combiner la diversité des points de vue entre les auteurs et l'unité de l'ensemble soit brillamment tenu, ne contribue pas peu à faire de cette somme une référence obligée.