N°26 / numéro 26 - Janvier 2015

Libérer la parole politique - Pierre Antoine Pontoizeau

Ed Embrassure 2014

Alexandre Dorna

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Cet ouvrage est la suite d’un autre : « Penser au delà des mathématiques ». C’est un travail d’une grande exigence et d’une densité due à la rigueur du raisonnement et des arguments logiques. Pourtant, sa lecture, même avec peu de familiarité dans ces domaines, trace un parcours d’une remarquable clarté et d’une grande érudition thématique.

La raison transformée en idéologie politique

Les essais de Pontoizeau qui composent le livre clarifient le doute qui plane, depuis un certain temps, sur les principales questions politiques, héritières des Lumières : les bases de la pensée rationnelle et ses principes d’universalité, et le cadre épistémologique des sciences modernes et sa légitimité. Cela concerne les théories et les hypothèses appliquées à la science politique et même le socle de la notion de démocratie moderne.

En conséquence, une prise de distance est salutaire et s’impose pour repenser  la parole et le discours politiques. Faut-il reprendre l’aliénation de la raison (supposer que ce que je dis est vrai) dans la source originale de la pensée. Nous devons, dit l’auteur, « avoir à l’esprit que les croyances qui président à la conception de l’homme, à celle du politique et même de l’histoire et du progrès chez les modernes résultent d’une subordination exclusive et univoque de la pensée occidentale à des affirmations scientifiques qui datent (…) et des croyances simplificatrices des théories mécanicistes de leurs auteurs » (p.123). Cette philosophie a imposé une apologie des méthodes mathématiques, l’idée d’une liberté individuelle, l’avènement de l’autonomie et l’émancipation totale de l’individu, et construit une mythologie de la modernité. Au nom d’une idée de la raison transformée en idéologie politique sur la base de certitudes abstraites logico-mathématiques.

Avec pertinence, H. Arendt réfléchit aux conséquences politiques de la pensée rationnelle et à son rapport avec les totalitarismes sur la question de simplifier la politique et de la réduire à gérer des choses plus que gouverner des hommes. Le positivisme de Comte se traduit dans cette attitude hyper-rationaliste, dont l’origine est déjà en puissance dans la philosophie de Descartes et reprise par d’autres afin de générer un système de contrôle qui prolonge la volonté de puissance et de domination.

Le théorème de Gödel

La réflexion de Pontoizeau est forte au point de faire basculer les socles sur lesquels la politique s’appuie pour aspirer à la qualité de science parmi les sciences et ainsi justifier le discours et les décisions des gouvernants. Il tire la conséquence de la crise du modèle mathématique des sciences modernes, c'est-à-dire la question de la valeur prédictive de la science et de sa cohérence absolue. Le théorème de Gödel a montré depuis 1931 le fait de l’indécidabilité d’un système autoréférent. Véritable pied de nez à l’arrogante certitude des scientifiques. D’autres épistémologues ont exprimé aussi leur doutes de voir la raison en tant que système consistant et d’une cohérence totale. Ce qui peut se traduire par l’idée que le calcul n’appartiendra jamais aux seuls mathématiciens. D’où l’hypothèse de l’effondrement des certitudes de la pensée rationnelle, et de la logique que sous-tend toute la démarche de la science devenue une autorité officielle.  

Pourtant, quelles sont les conséquences d’une telle mise en question du paradigme ?

Si l’effondrement de la cohérence (prétendument absolue) du paradigme de la science moderne ne semble plus valable, alors la science politique devrait tirer profit de cette situation et développer une approche indépendante. Cependant, la connaissance politique reste paralysée devant le défi de reprendre sa propre liberté, tant elle reste soumise à l’emprise de la formule scientifique moderne.

Plusieurs questions sont toujours latentes : l’impact des limites de la connaissance rationnelle est-il véritablement évalué ? Les limites du discours rationnel prennent-elles en considération le discours politique et la théorie politique de surcroît ? Quelles seraient les conséquences du questionnement du paradoxe gödelien. Et quels sont les effets d’un langage formalisé si la logique bute sur ses propres limites ?

Sans doute ces questions n’ont-elles pas ébranlé complètement la croyance que la science pouvait construire un langage rationnel capable de rendre compte du tout, tel que le positivisme et le néopositivisme logique l’ont voulu. Et il faudrait y ajouter certaines tendances marxistes. L’auteur fait une longue citation d’H. Arendt dont l’essentiel se résume ainsi : « La tyrannie de la logique commence avec la soumission de l’esprit à la logique comme processus sans fin, sur lequel l’homme compte pour engendrer ses pensées… »

Disons que l’auteur ne prétend pas se positionner ouvertement sur l’avenir, en limitant ses affirmations à un témoignage qui passe par l’étude de la limitation présente dans une autre réflexion philosophique qui met à l’épreuve les notions qui ont guidé les temps modernes. Le souci de l’auteur semble-t-il prendre sérieusement en considération les limitations, la distanciation et la recognition constitutives d’une autre philosophie politique. Car, derrière la réalité que l’expert (et c’est aussi une tentation valable en politique) décrit avec autorité avec ses calculs, il faut reconnaître que se cachent des limites logiques représentant des intentions, des intérêts et des finalités qui interviennent dans l’acte rationnel de l’expertise. Autant en science qu’en politique, l’argument logique ultime (la vérité totale) ne s’achève pas ni ne fait taire la raison du contradicteur. Ainsi tout discours et toute théorie politique qui aspirent au langage global et formalisé propre à la logique mathématique s’avèrent un germe totalitaire de faire taire par la raison et avec la raison.

Les visées de l’ouvrage

Les cinq essais qui composent cet ouvrage sont donc la tentative de montrer que « le pouvoir de la parole excède celui de son discours » et de témoigner d’une nouvelle ère de la pensée politique, dont les objets et les fins vont sans doute diverger de l’ambition systématique et dogmatique de la science politique actuelle devenue une idéologie, où gouverner les êtres humaines est semblable à administrer rationnellement les choses comme les objets.

Voyons rapidement la visée de ces essais.

Un premier essai cherche à montrer comment la plupart des passeurs de la science dans la politique n’ont fait que maintenir l’emprise du paradigme classique des modernes. En particulier avec la tentative de formaliser les actions et les réactions individuelles et collectives par la voix des experts, toujours tentés de justifier statistiquement les discours et les décisions politiques. En bref, la théorie politique moderne issue du langage logico-mathématique et les figures de pensée qui en découlent ne peut pas faire l’économie de la question de l’incomplétude.

En approfondissant ces propositions, le second essai articule les concepts sous-jacents et montre l’ambivalence constitutive de la politique, c’est–à-dire la relation entre les membres et l’ensemble, les différences élémentaires et l’unité de l’ensemble. La politique tend à lier et à réunir : d’où la constitution en termes modernes des expressions de l’unité : langue, culture, histoire, religion, etc. Ainsi, la politique est constituante des termes qui équilibrent les aspects de l’autonomie et de l’hétéronomie ; les éléments d’aliénation et de domination et de soumission autant que les contreparties de libération et d’émancipation. En entrecroisant ces concepts, le paradoxe constitutif de la politique émerge : la dualité autonome et hétéronome manifeste l’individuel et le social qui donnent forme à l’homme politique. Ainsi, à la limite, l’autonomie renie l’hétéronomie, mais celle-ci se réintroduit du fait de l’histoire et rend apparente la complétude logique du social-individuel. Or, plusieurs observations contestent la prétention totalisante de la logique et réfutent au langage formalisé la possibilité de réduire le sujet à ses attributs pour le définir. Une intéressante exposition logique menée par l’auteur avec brio permet de mieux apprécier l’importance de l’incomplétude qui compose sans imposer les discours.

L’étude suivante, riche en suggestions, illustre comment le formalisme mathématique devint constitutif de l’ordre politique conventionnel. Reconnaitre cela justifie que le politique et le scientifique établissent une verite univoque par la cohérence d’un langage unique visant l’exactitude dans une harmonie exprimable par des lois mathématiques. Pour ainsi faire de la programmation et du calcul la légitimité d’un gouvernement, car scientifique et objectif. Or, la mathématisation de la politique est limitée par la crise « gödelienne » de ses fondements. Question qui pose le concept de repenser (recognition) la pluralité, afin de travailler une autre forme de reconnaître et d’agir en politique en dehors des systèmes logico-scientifiques, qui caractérisent le mode de penser la politique des modernes, pris dans la logique du vrai-faux, sans reconnaître une autre vérité possible : le vraisemblable. Apparaît alors un complément intuitif de la raison, champ de l’argumentation persuasive rendu particulier par l’empire de la méthode scientifique, qui veut un projet construit par la détermination totale et absolue. C’est toute la distance que la politique se doit de reconnaître dans la pluralité des êtres et des choses et non dans la quête vaine de l’unité autoréférencée de la démarche logico-scientifique.  

Un autre essai montre comment la parole politique trouve sa place dans cette vision de pluralité exprimable en termes de praxis de la pensée qui attend la reconnaissance non comme une simple répétition d’une connaissance, mais comme une expérience neuve. Cela n’est pas reproductible à une science. Puisque la politique faite parole se constitue ensemble en se reconnaissant, voilà que la parole politique est une condition de la politique en tant que source d’inspiration intuitive. Alors que, dans la vision rationaliste, elle se veut un vecteur de vérité univoque et non un acte de témoignage incomplet, qui demande la reconnaissance des autres dans une création collective en quête d’une croyance commune librement consentie.

Le quatrième des essais traite de l’application des réflexions des chapitres antérieurs. Ainsi, l’auteur prend le cas du concept d’égalité dans un cadre épistémologique. Pour les modernes, l’égalité est une vérité incontestable dont l’interprétation est issue de la logique arithmétique et c’est une figure d’une autorité rationnelle dogmatique : 1 = 1. Le raisonnement mathématique étend son empire logique sur les autres sciences humaines et sociales (SHS), du fait de l’exactitude et de la cohérence résultant de son application et comme une évidence de calcul. Non sans raison, Descartes conçoit la science universelle comme l’extension de la mathématisation à tout objet de science dans un monde logique dirigé par l’ordre et la mesure. Donc, la calculabilité devient la règle de la méthode scientifique, qui impose l’égalité arithmétique en réduisant l’objet. Or l’égalité arithmétique est affirmée, mais jamais démontrée, et utilisée sans réserve. Structurant ainsi les sciences, leurs hypothèses et leurs théories, de plus l’application s’étend à d’autres domaines y compris les SHS. La doctrine de l’égalité arithmétique inspire la figure : « toute chose égale par ailleurs ». Celle-ci, en utilisant les termes de l’auteur, « extrapole l’égalité pour ce qui n’est pas l’objet de calcul, mais elle en est la condition de vérité, puisque l’égalité préjuge effectivement de la neutralité de l’environnement, non pris en compte dans le calcul. Et, pour le neutraliser et l’isoler, il s’agit bien d’affirmer a priori la permanence de son égalité ». Raisonnement et question qui posent problème dans leur application aux SHS. Et il en va de même concernant une autre condition de la mathématisation : la quantification. Car, selon l’adage de Nils Bohr : « ce qui ne se mesure pas n’existe pas ». Bref, la subordination à la mesure signifie que la mathématisation impose ses caractéristiques aux autres objets. Mais rien n’est moins évident, surtout en SHS.

Les conséquences de l’égalité arithmétique et de la quantification par la mesure ne sont pas neutres dans d’autres domaines et l’auteur illustre ses propos en trois domaines différents : la physique, l’économie et le droit.

La description du cas de l’économie devrait nous intéresser en premier, car nos sociétés actuelles ont fait de cette discipline le phare de leurs aspirations, au point que la pensée économique incarne l’adaptation réussie au modèle logico-scientifique pour orienter les décisions et les objectifs du monde. En s’intéressant aux conditions d’unicité et de stabilité des équilibres, les économistes (pas tous certes) ont proposé et cru à une théorie générale modélisée d’économie de marché. L’offre et la demande s’inscrivent dans des équations et la solution prétend se trouver dans un système mathématique. Et l’équilibre fait référence à ce modèle. Ainsi la mathématisation a renforcé la tendance à fixer les politiques en fonction d’hypothèses formalisées.et s’impose selon la logique prédictive. De sorte que les règles sont prises comme des vérités contraignantes techniquement opérationnelles. Ce formalisme détermine logiquement l’ensemble de la société.

Plus largement, au nom de la science, les économistes tentent de se débarrasser des approches non scientifiques ou philosophiques. L’économie devient donc une technique dont les conséquences sont passées (brièvement) en revue par l’auteur. Une première limitation : la modélisation ne tient compte que d’une partie infime des choses. Une seconde : la modélisation ne fait pas de création théorique. Et une troisième : la consistance de la modélisation économique ne peut pas tenir compte de sa seule modélisation, car il lui faut intégrer dans l’étude de l’humain d’autres notions provenant des SHS, qui ne sont pas ou très peu modélisables (histoire, anthropologie, sociologie, psychologie, etc.).

L’ouvrage se ferme sur un dernier chapitre dont le contenu traite de l’utilisation d’une autre notion : la souveraineté. Il s’agit d’un commentaire où la réflexion sur la politique se concatène à la question du rationalisme et de sa place dans la science moderne. La doctrine de la modernité fabrique une souveraineté où la parole est rationnelle, autonome et individuelle de surcroît. Bref, la parole (politique) se veut souveraine, en exprimant ainsi le projet philosophique des modernes. Cette proposition des modernes s’avère paradoxale : l’homme se penserait libre de toutes limites et se poserait en souverain en franchissant les bornes de sa propre condition. D’où l’ironie d’Erasme faisant l’éloge de la folie.   

Néanmoins, il est intéressant de rappeler que la souveraineté représente en politique le pouvoir suprême incarné dans une autorité physique ou morale, laquelle est unique et indivisible, c'est-à-dire dépositaire des attributs de la rationalité : univoque, permanente et cohérente. Et aussi qu’au commencement de la modernité la demande de souveraineté du politique consiste à le délier de l’autorité spirituelle.  Pareillement, le principe de la raison, voire le rationalisme en philosophie, est en lutte pour son autonomie à l’égard de la théologie, de même que dans les dites sciences naturelles l’irruption de la méthode logico-scientifique se dresse contre la tutelle de la pensée religieuse.

L’autonomie de la raison décrit et fortifie logiquement celle désirée pour l’Etat et induit la raison d’Etat véritable : source de la conception rationnelle du bon État et de la bonne gestion qui marque profondément la philosophie politique de la modernité. De fait, la raison en politique doit formuler des règles dans une sorte de syntaxe cohérente. C’est la souveraineté méthodologique des sciences affirmant leur autonomie qui est à l’ origine de la souveraineté politique, d’où l’influence de la première sur la seconde, qui ne cesse de s’accentuer avec le positivisme au XIXe siècle. Une telle matrice se retrouve dans la vision technocratique actuelle. Ainsi, la rationalité se resserre dans ses liens entre la science (et sa méthode) et la politique (avec le droit) qui conditionnent largement l’autonomie de la parole.

Le chemin de Damas 

En débordant les propos de l’auteur, même en forçant ses traits, il nous semble que l’approche politique, dans le cadre de la démocratie moderne, avec son ambition d’assurer la souveraineté du peuple, ne peut que se piéger elle-même.

La question de départ est posée ainsi : la parole du peuple souverain peut-elle ou a-t-elle le pouvoir de se délier de la convention des mots institués par une alliance implicite, idéologique et méthodologique, avec la logique politico-scientifique existante ? A-t-elle le pouvoir de se reprendre, de se contredire, voire de se nier, de changer de cadre (règles et lois) dans cette autonomie qui lui concède la souveraineté ? En d’autres mots : le peuple souverain est-il maître de lui-même ? Et comme se demande l’auteur lui-même : la parole est-elle pour autant la liberté ?

En utilisant une analogie, dans les dernières pages de ce livre, l’auteur nous fait découvrir le paradoxe de l’Inconnu dans l’ouvrage « Le Chemin de Damas » du dramaturge A. Strinberg. Cette pièce raconte comment un écrivain célèbre égaré dans une ville étrange va, au prix de maintes épreuves et visions, atteindre une forme d’illumination qui, en fin de voyage, le pousse à se taire. Le personnage principal se dissout dans la tentation, voire l’obligation, d’être tout et son contraire. L’auteur semble envisager une humanité contemporaine en passe de saper ses propres fondations par surabondance de raisonnements logiques. Il n’est pas étonnant de constater que cette œuvre a eu une forte influence sur la réflexion de C. Jung.

Ce n’est pas autre chose que Goya, le célèbre peintre espagnol, exprime dans une gravure. C’est la terrible déception des Lumières pour cet homme qui avait soutenu la Révolution française. Le peintre est doublement présent dans l'image, endormi / éveillé, comme s'il incarnait lui-même la faillite de la raison, l'émergence du moi et son effacement. Chez Goya, les fantômes assaillent la modernité. Le réel et le fantastique se confondent. De plus le titre du tableau en espagnol est : « El sueño de la razon produce monstruos » (le rêve de la raison produit des monstres). Mais, comme le mot sueño signifie à la fois rêve et sommeil, cela peut signifier que la raison dort, ou qu'elle rêve, soit les deux. En tous les cas, elle ne voit pas les monstres qui l'assaillent, mais ses cauchemars sont pourtant les siens.

Le politique rejoint ainsi l'intime dans les deux situations. Ainsi, chez Goya, les conséquences des Lumières sont un révélateur puissant de la manière dont une pensée nébuleuse se transforme en aporie utopique. Et le théâtre de Strinberg est le pèlerinage dramatique de la raison à la lueur de la conscience. Pour l’un et l’autre, les bases logico-méthodologiques de la pensée rationnelle se révèlent indéterminées.

Les raisonnements de Pontoizeau, pensons-nous, mènent à confirmer que les sciences modernes, avec leur désir de certitude mathématique et de formalisme, se heurtent à une impasse dont le théorème de l’incomplétude représente un repère de l'impasse logique. Voire à la manipulation lorsque le modèle scientifique s’impose à d’autres domaines, en particulier la politique ; et que, par ricochet, l’extension des méthodes des sciences entraîne la fois la prétention de construire une science politique (et les SHS sont comprises) et la transformation du savoir politique en appendice de la gestion du pouvoir, sorte de technique qui dévore et remplace la vocation empirique et artisanale de la recherche d’accords et d’acceptation des pluralités dans la résolution des conflits humains. La recherche politique d’union chez les humains n’est pas la quête d’une théorie univoque qui, en éliminant la pluralité, réussirait à résoudre les problèmes avec des formules exactes et des règles opérationnelles ad hoc. Ainsi en arrive-t-on à nier la politique elle-même.

En conclusion

Rappelons enfin que le titre de l’ouvrage est « Libérer la parole politique », pourtant le contenu reste plus épistémologique que politique. En quelques mots : la soumission du politique à la méthode des modernes mène soit à une aporie utopique qui se transforme en idéologie, soit à une confusion de langage qui paralyse le véritable sens de la parole politique : servir de médiateur entre forces contradictoires.

C’est pourquoi la pensée politique doit inventer une autre manière de se poser en dehors de la méthode proposée par la science moderne. Il s’agit de repenser, mutatis mutandis, ses propres sources devant l’emprise des mathématiques comme modèle unique. Car, en fait, dire que la parole peut ou doit être modélisée équivaut à valider l’argument que tout se vaut dans la plus grande indifférence. Ou conclure à la posture nihiliste et autoritaire qui se résume à l’assertion suivante : toute discussion est inutile. Et c’est précisément là que le discours retrouve toute sa force totalitaire et doctrinale.

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