N°27 / Religion et politique Juillet 2015

Compte rendu : L’erreur de calcul

Regis Debray - L’erreur de calcul. - Ed. Le poing sur la table ; 2014

Jacques Sardes

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Les effets du calcul politique

Un nouveau pamphlet de Debray. Il vise la phrase de M Valls : « j’aime l’entreprise »et esquisse comme toujours des bonnes analyses de conjoncture. C'est un penseur de la politique qui nous devance et alimente la réflexion critique.

Ce texte de petite taille : l’Erreur de calcul, distille un réquisitoire à travers quelques repères : l’effusion, l’inflation, la subversion, la remémoration, la fascination, l’implosion, l’aliénation. Une revue des questions sur les impostures actuelles. Ce sont des banderilles contre le système politique et l’idéologie de la gauche.qui n’est autre chose qu’une dépendance de l’économie.

Avec ironie, Debray nous rappelle d’emblée la déclaration d’amour de M. Valls concernant l’entreprise. Un cri du cœur contrarié par les faits. Car logiquement le patronat n’aime pas les socialistes.

Le chef du gouvernement avait fait le saut de l’ange : Car « il aime l’entreprise » et le déclare sans maitriser les revirements et les virages, sans pudeur avec un techno économisme d’amateur qui dit long sur ses engagements passés.

Debray a raison de s’énerver .Voilà l’état d’esprit d’une époque. L’illusion de l’économique et la déperdition de la politique.

D’où la place des ces « banderilles » dans l’arène politique.

Première banderille. Le langage et son inflation quantitative. C’est un premier commentaire sarcastique : Un ministre de la culture et de la communication, s’incline devant les chiffres, comme les chercheurs devant les exigences de publier en anglais dans des revues américaines. La boucle de l’inculture est bouclée. La crise montre comment discipline économique ne l’est pas. En revanche, les experts en chiffres et statistiques sont gagnants. La pseudoscience économique surestimée même si elle rate tous les diagnostics et s’impose sans proposer des bonnes thérapies. « Le néolibéralisme est un marxisme retardataire ». Il y a un manque à gagner dans les analyses des technocrates ; Debray enfonce le clou le sarcasme : L’économie en tant que science est une vulgate, une sorte d’instruction religieuse. , et bien que l’économiste attitré déteste les idéologies, il se justifie par sa pédagogie idéologique. La modernité en est le miroir. et les mots gonflent et perdent leur sens.

Deuxième banderille : la subversion de la République par l’ancien régime. L’école laïque, dans la modernité version sociale libérale, c'est le mot de passe qui donne aux business schools des allures progressistes, justifie tous les abandons et paralyse la réflexion de la gauche. C'est devenu le totem des conservateurs, Nouvelle religion qui permet de liquider toutes les conquêtes sociales et politiques en prêchant la soumission au temps présent et à la fatalité. Où rien n’est possible sauf le mépris ignare du passé..L'obligation de s'adapter : « Ni la République, ni la résistance n'ont été des faits d'adaptation. S'adapter en 1940, c'était collaborer. Aujourd’hui s’adapter, c'est la mondialisation et la « transformation des Lumières en établissements publics à caractère commercial ». Valls n’a pas compris que l’argent n’a pas de patrie, les financiers n’ont pas de patriotisme et n’ont pas de décence, leur unique objectif est le gain ». (Napoléon 1er)

La troisième banderille : l’aliénation. La démocratie est une écoute pour ne rien dire. Tout serait sacrifié à l’Union européenne : « Dans la salle des marchés de Monsieur Hollande, c’est la commission de Bruxelles et le 3 % de déficit autorisé qui veut et vaut qu’on souffre pour elle ». Cette « religion ambiante du salut par l’abdication de l’indépendance. Tout est devenu calcul. Et choses inutiles”. Quand la stratégie s’en va, reste le chiffre comme révélateur de la réalité. Impossible d’endiguer l’épidémie de « calculite ».

Quatrième banderille : la remémoration. C’est l’illusion de continuité. Si la Nation est remplacée par l’entreprise Il n’est pas question de mourir pour Total. Si l’homme de foi a ses fanatiques, l’homme du socialisme social-démocrate a ses traîtres et ses corrompus. C’est la célébration de la loi du marché et du divertissement.

Une cinquième banderille : la fascination. Les hommes d’idées sont devenus nos think–tanks.

L’élite ancienne parlait le grec et le latin, la moderne un mauvais anglais du globish économique, nullement dans sa version cultivée.

Sixième banderille : l’implosion. Gardons-nous de nous plaindre : il n’y a pas explosion, seulement dispersion. Pas d’articulation, mais juxtaposition. C’est le prix de l’adaptation. La misère symbolique détruit ce qu’on remplace. La démocratie se laisse facilement aller vers la vacance de l’esprit. Debray dénonce : « L'économie est une vulgate où l'endoctrinement s'appelle explication. » Seule la manipulation de chiffres compte. Valls aime le marketing politique, les rapports de force, nullement les citoyens, les gestes autoritaires. Debray juge sévèrement : « L'économie est une vulgate où l'endoctrinement s'appelle explication. »

Septième banderille : l’aliénation. C’est le résultat d’une culture en panne économique de la pulsion immédiate des responsables capricieux : sous l’influence d’un éclipse des Lumières.

Un opuscule à lire en ces temps de morosité. Peut-être un reproche a lui faire, c’est l’utilisation des connaissances implicites, mais il rendent bien sophistiques des raisonnements simples. N’est pas philosophe qui veut.

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